
Le Criquet N°283 - Paganini ou le violon du diable
Voici mon dernier rédactionnel paru dans le Criquet magazine N°283 de février 2025 en page 4.
Paganini ou le violon du diable
Niccolò Paganini est sans doute le violoniste le plus incroyable de tous les temps. Figure emblématique du romantisme, il est né à Gênes en 1782. L’enfant prodige étant trop doué, beaucoup de professeurs se succédèrent déclarant ne rien avoir à lui apprendre. Et pour cause, son incroyable habileté l’a amené à imposer de nouvelles techniques de violon jamais développées auparavant, comme en attestent ses 24 caprices composés entre 1801 et 1817. Paganini commença à se produire en concert dès l’âge de neuf ans avant de partir pour de nombreuses tournées en Europe. Virtuose aux prouesses inimaginables, il repoussa si loin la maîtrise du violon qu’on disait qu’il avait vendu son âme au diable. En réalité, il tirait son talent d’un entrainement assidu, jusqu’à quinze heures de pratique par jour… Par ailleurs, on pense que Paganini souffrait du syndrome de Marfan, qui consiste en une hyper laxité ligamentaire. Il parvenait ainsi à imprimer à ses premières phalanges un mouvement de flexion latéral extraordinaire sans que le reste de sa main ne bouge ! Grâce à son audition extrêmement développée, il s’accordait d’un simple frôlement du doigt sur la corde malgré l’activité la plus bruyante d’un orchestre au complet. Cultivant son charisme et son sens du spectacle, Paganini contorsionnait son corps dans tous les sens pendant ses prestations. Ses yeux perçants à l’éclat surnaturel, ses longs cheveux s’agitant dans de violentes secousses et son visage exsangue lui donnait un aspect inquiétant. Cassant parfois une corde, il poursuivait comme si de rien n’était allant même jusqu’à briser son archet, pris par la fougue de son jeu. Il était d’ailleurs fréquent que des spectatrices, trop émues par son énergie spectaculaire, perdent connaissance. Une légende raconte que la foudre aurait frappé son archet lors d’une performance et ceux qui l’ont vu imiter la tempête sur son violon affirmaient qu’il était possédé… Il fut aussi un guitariste talentueux et écrivit de nombreuses pièces pour violon et guitare. À ce propos, il disait: “je suis le maître du violon, mais la guitare est mon maître”. Il meurt dans le silence et la maladie à l’âge de 58 ans sans même avoir reçu les derniers sacrements.
Olivier Mesnier, Professeur de guitare et musicien